Grossesse

La couvade : tout savoir sur cet étrange syndrome

Un homme ne peut pas porter la vie. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne ressent rien, si sa compagne est enceinte. Certains hommes vont même jusqu’à développer des symptômes similaires à ceux de leur partenaire enceinte… Voici donc quelques explications au sujet de la couvade, cet étrange syndrome.

Qu’est-ce que la couvade ?

Également appelée « grossesse nerveuse de l’homme », la couvade est un syndrome observé chez le compagnon (voire la compagne, dans le cas d’une union homosexuelle) de la femme enceinte. Il relève des troubles psychologiques, mais sa symptomatologie est avant tout psychosomatique. On observe donc chez le compagnon de la future maman des symptômes caractéristiques de la grossesse : 

  • Une prise de poids, particulièrement localisée au niveau de la sangle abdominale
  • Des nausées matinales
  • Des douleurs lombaires
  • Un syndrome de jambes lourdes
  • Des maux de tête
  • Des pulsions alimentaires ou au contraire une perte d’appétit
  • Des troubles du transit

Parfois, on peut également noter des symptômes psychologiques typiques de la grossesse, comme l’émotivité, la fatigue, l’irritabilité ou les troubles du sommeil

Dans les cas extrêmes on peut même observer des sensations de contraction abdominale, des douleurs lors de l’accouchement, une sécrétion anormale de prolactine, voire un épisode dépressif lors du post-partum.

Comment explique-t-on le syndrome de couvade ?

Il faut tout d’abord faire un flashback historique. La couvade était à l’origine une pratique faite de rites pendant la grossesse d’une femme, son accouchement et la période post-natale. Ces rituels étaient une initiation à la paternité. Certains peuples poursuivent encore aujourd’hui les rites typiques de la couvade (par exemple un alitement du père pendant l’accouchement et/ou les premiers jours de la vie du nouveau-né). 

Mais ces traditions n’ont pas de place dans les sociétés occidentales. Aussi, certains hommes manifesteraient autrement les sentiments qui les habitent lors de la grossesse de leur compagne. Le syndrome de couvade pourrait être pour l’homme :

  • Une façon d’exprimer ses doutes, voire son angoisse profonde  – sur l’état de santé de sa compagne ou de son enfant, sur sa capacité à devenir père, sur sa place et son rôle dans la nouvelle structure familiale.
  • La manifestation physique d’une empathie et d’engagement extrêmes à l’égard de la femme enceinte. Le mimétisme émotionnel se traduirait par une symptomatologie physiologique.
  • La traduction d’un sentiment d’inutilité, l’homme ne pouvant porter la vie.
  • Une nécessité (inconsciente) de rappeler à l’entourage qu’il existe, alors que l’attention est essentiellement portée à la future mère et à l’enfant à venir.
  • La conséquence de fluctuations hormonales. On observerait chez les hommes touchés par la couvade une baisse du taux de testostérone et une sécrétion plus importante de prolactine et d’ocytocine.

L’ensemble de ces théories n’ont, aujourd’hui, pas encore été validées scientifiquement. Il s’agirait de conduire des études empiriques pour mieux expliquer le syndrome. 

À préciser enfin que certains scientifiques et médecins ne croient pas au phénomène de couvade. Pour eux il s’agirait purement et simplement d’un mythe. D’ailleurs, pour entériner cette thèse, certaines études auraient démontrées que la grossesse d’une femme n’entraînerait aucune prise de poids chez son conjoint. L’IMC des pères aurait plutôt tendance à grimper après l’arrivée d’un bébé, et s’expliquerait entre autres par une modification du mode de vie : sédentarité accrue, moindre activité physique, alimentation de moins bonne qualité.

Couvade : quelle ampleur au sein de la population masculine ?

Il est aujourd’hui difficile d’estimer avec précision combien d’hommes sont réellement touchés par la couvade, car le phénomène est tabou. Pour autant, et bien qu’il ne s’agisse pas d’une maladie médicalement reconnue (elle ne figure pas dans le DSM, qui répertorie l’ensemble des troubles psychiatriques), la grossesse nerveuse de l’homme est clairement identifiée par le corps médical. Et elle est loin de se cantonner à quelques cas isolés.

D’ailleurs on est aujourd’hui capable de produire quelques estimations(1)(2) :

  • La prévalence en Grande-Bretagne oscillerait entre 11 et 50%.
  • En Australie, environ 31% des hommes seraient concernés.
  • Aux Etats-Unis, le syndrome toucherait entre 25 et 52% des futurs pères.
  • En Suède, environ 20% des hommes seraient concernés.
  • En France, il s’agirait de 30% des futurs papas.
  • Les populations asiatiques seraient les plus touchées, avec 61% des pères thaïlandais et 68% des papas chinois touchés. 
  • Enfin en Pologne, 72% des hommes auraient affiché au moins un symptôme du syndrome de couvade.

Comment expliquer de telles disparités ? Plusieurs raisons peuvent justifier de ces chiffres :

  • Le syndrome, encore mis en doute, n’est que peu étudié.
  • Dans certains pays, la couvade reste un tabou, si bien que les hommes gardent le silence à propos de leur symptomatologie. 
  • Toutes les études ne se basent pas sur les mêmes critères pour qualifier un cas de couvade. Certaines ne reposent que sur le diagnostic d’un seul symptôme (typiquement, la prise de poids), tandis que d’autres en exige au moins deux.

Couvade : comment réagir ?

Lorsqu’on présente des symptômes de couvade, la première démarche à entreprendre est d’en parler, car le syndrome est avant tout d’origine psychologique. Ainsi  on peut consulter le médecin traitant, le gynécologue, un psychologue, la sage-femme… Les professionnels de santé en charge du suivi de la femme enceinte sont des interlocuteurs fiables.  Il est également conseillé d’échanger avec la future maman : partager ses angoisses mutuelles ne peut que faire grandir la relation et contribuer positivement à la définition des rôles au sein de la nouvelle structure familiale. 

Si les symptômes de couvade s’expliquent par un sentiment d’ « exclusion » du père, ce dernier est invité à effectuer un travail sur lui-même. Pour ce faire, rien ne vaut l’action : le futur papa peut donc s’adonner à des activités en relation avec la grossesse de sa conjointe. Par exemple il peut investir son rôle de père avant même la naissance de l’enfant, en participant activement à son arrivée : préparation de la chambre, achat de matériel, accompagnement de la maman aux rendez-vous médicaux, traitement des démarches administratives…  Il peut aussi nouer, avant la naissance, des liens avec son enfant: caresses au ventre, parler au bébé, participation active aux ateliers prénataux…

La couvade a des répercussions physiques. Aussi, pourquoi ne pas mettre en place des efforts d’hygiène de vie, pour contrecarrer la symptomatologie ? Une alimentation équilibrée et variée, une hydratation abondante à base d’eau, une activité physique régulière et du repos pourraient être particulièrement bénéfiques.

Enfin, sachez que dans la large majorité des cas, les symptômes de couvade disparaissent à la naissance du bébé. Mais certains pères se retrouvent piégés dans un mimétisme émotionnel et sont parfois touchés par le baby blues. Il faut alors agir : consultation avec un professionnel de santé, groupe de parole pour pères, suivi psychologique. La verbalisation des craintes, angoisses et questions est bien souvent salutaire.

Références

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